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Pamela Weathers : « L'OMS devrait financer les études sur l'Artemisia annua ».

La biologiste américaine Pamela Weathers est une spécialiste mondialement reconnue de l’Artemisia annua et de son principe actif l’artémisinine, utilisé notamment contre le paludisme. Au sein du Worcester Polytechnic Institute (WPI), elle étudie l’armoise annuelle depuis près de trente ans. Elle nous donne son point de vue sur le potentiel de l’Artemisia annua face au Covid-19, et sur la position ambiguë de l’OMS.
P&S. Vous étudiez l’Artemisia annua depuis près de trente ans. Considérez-vous cette plante comme un traitement possible pour le Covid-19 ?
P.W. En traitement oui. Une étude de 2005 a montré que l’extrait d’Artemisia annua s’attaquait au virus SRAS (ou SARS-Cov-1). Or le Covid-19 est aujourd’hui reconnu comme le second SRAS. Par conséquent, si l’Artemesia annua est capable d’agir sur le SARS-1, il y a de fortes chances que cette plante puisse agir sur le SARS-2, autrement dit le Covid-19. Par ailleurs, une autre publication faite par le laboratoire Mateon Therapeutics en Californie indique que l’artémisinine inhibe fortement le coronavirus à l’origine du Covid-19 lire encadré ci-dessous). D’autres publications évaluées par des pairs sont toutefois nécessaires pour corroborer et confirmer ces allégations.

P&S. Quel rôle pourrait jouer l’Artemisia annua contre le Covid-19, plutôt un rôle préventif ou curatif ?
P.W. On ne peut pas être encore sûr. Mais d’après l’étude chinoise de 2005*, cette plante pourrait être utilisée en traitement.

P&S. Est-ce que l’on sait si c’est l’artémisinine qui agirait contre le Covid-19 ou est-ce une combinaison des composantes de la plante ?
P.W. C’est probablement l’artémisinine, mais nous n'en sommes pas certains. Cela pourrait aussi bien être la totalité de la plante.

P&S. Quels effets bénéfiques spécifiques la plante est-elle susceptible d’apporter aux malades du Covid-19 ?
P.W. On espère qu’elle apporte un effet antiviral. Nous savons également que l’Artemisia annua et l’artémisinine contribuent à réduire l’inflammation, ce qui pourrait aider à réduire la tempête de cytokine qui semble être fatale pour beaucoup de patients atteints du Covid-19. Une étude récente effectuée sur des rats (lire encadré 2) a montré que la plante Artemesia annua est plus efficace pour réduire l’inflammation que l’artémisinine seule.

P&S. Cette plante provoque t-elle des effets secondaires ?
P.W. L’Artemesia annua est sans danger et ne présente aucun effet secondaire.

P&S. Une simple infusion peut-elle être suffisante, à l’instar du Covid-Organics, le remède proposé à Madagascar ?
P.W. Il n’existe aucune étude scientifique valide qui confirme l’efficacité du remède Covid-Organics.

P&S. Que pensez-vous de la position de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui demande l’établissement d’essais cliniques pour déterminer l’efficacité et l’innocuité de l’usage d’Artemisia annua ?
P.W. Cette position semble raisonnable et légitime, cependant quand il s’agit de mener ces essais, il n’y a plus personne pour les financer. C’est donc ce que l’on appelle une impasse : on demande des études rigoureuses, mais par la suite on les empêche de se faire et on ne les finance pas. Je pense que les pays africains, en particulier, vont prendre les choses en main et vont élargir leur utilisation de l’Artemisia annua, soit sous forme de thé, soit autrement. Félicitations à eux pour leur façon de prendre en charge leurs soins de santé au lieu de se voir imposer des traitements par d’anciens colons essayant de leur dire quoi faire !

P&S. Pensez-vous que l’OMS se montre trop prudente concernant cette plante pourtant utilisée depuis des millénaires ?
P.W. Certes je comprends que l’OMS veuille rester prudente, mais il existe des preuves lourdes qu'en premier lieu, la consommation d’Artemisia annua est sans danger et qu’en second lieu cette plante est efficace contre de nombreuses maladies. Par ailleurs, son utilisation exige des conseils et un encadrement solides plutôt qu’une interdiction car les gens l’utiliseront quand même. Enfin, il est de la responsabilité de l’OMS et d’autres de financer les études et les données nécessaires pour aider à formuler cet encadrement le plus tôt possible (et non le plus tard possible !).

L’OMS a perdu bien trop de temps à écrire des interdictions d’utilisation plutôt que d’encourager les études nécessaires à l’établissement d’une ligne directrice sensée. Des études bien menées et solides sont souvent ignorées pour la seule et unique raison que leurs conclusions ne plaisent pas. C’est très décevant. L’OMS ne devrait pas faire obstacle, elle devrait au contraire apporter son soutien à des études scientifiques supplémentaires qui sont nécessaires pour informer les gens sur la façon d’utiliser l’Artemisia annua de manière efficace.

P&S. Selon vous l’OMS soutient-elle réellement la médecine traditionnelle en Afrique ?
P.W. Ce n’est pas si clair. Actuellement, il semble qu’il s’agisse plus de belles paroles que de véritables actes. À mon sens, il y a peu de preuves indiquant que l’OMS soutient véritablement les médecines traditionnelles validées.

P&S. Pensez-vous que l’Artemisia annua puisse être adoptée aux États-Unis et dans les pays européens, tout au moins à titre préventif ?
P.W. Alors, il n’est pas encore sûr que l’Artemesia annua ait un rôle préventif. En revanche, de plus en plus d’études montrent son efficacité thérapeutique. Cette plante sera très certainement utilisée aux États-Unis, d’où la nécessité de recherches approfondies et sérieuses pour accompagner le développement de son utilisation, aux États-Unis en tous cas. Ces études permettront d’utiliser cette plante correctement. Concernant les pays européens, je ne peux pas me prononcer [l’Artemisia annua est interdite en France Ndlr].

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